Nathalie Talec, Jeanne Brun, french and english translation, 2016

English translation below

La philosophie d’Aristote – et bien d’autres après lui – fait la distinction entre ce qui, du monde matériel et immatériel, est en acte, et ce qui est en puissance. Deux exemples, souvent utilisés, illustrent et précisent ces deux modes d’être. Le bloc de marbre, brut, est ainsi en puissance une statue ; mais c’est le sculpteur qui fait exister celle-ci en acte, en tirant la forme de la matière indé- terminée. L’œuf, lui aussi, est en puissance ; l’animal qui en éclot est en acte. Dans le premier cas la puissance est passive, nécessitant l’intervention d’un tiers agissant ; dans le second elle est active, contenue dans l’œuf même. La puissance quoi qu’il en soit n’ouvre pas à toutes les déterminations possibles : par un jeu de passe-passe qui garantit un certain ordre des choses, l’acte préexiste à la puissance. Un œuf peut ainsi s’actualiser en oiseau, mais pas en chèvre. Et dans l’acte seul, dans cette même logique, dans son achèvement et sa détermination totale, réside la perfection.

Par un audacieux court-circuit, et par la force d’évocation de leur blancheur et de leur forme, les Snow Balls de Nathalie Talec m’évoquent étrangement ces exemples du marbre et de l’œuf. C’est sans doute que l’artiste saisit en elles – dans le double sens où elle l’atteint et le préserve – un état de suspension et d’ouverture, tant dans la référence aux phénomènes physiques (la neige comme état d’équilibre instable de l’eau, cristallisée par le froid), que sur le plan formel (l’ovoïde imparfait contenant une multiplicité de formes potentielles) ou fictionnel (la boule de neige évoquant autant la douceur de l’enfance que la dureté de la bataille).

Il y a ainsi dans le travail de Nathalie Talec quelque chose qui se refuse obstinément à être, dans cette acception, en acte. Le sens de son œuvre se trouve au contraire dans ce qui se tient à la fois en réserve et en germe ; à la fois comme latence, et comme capacité de mouvement et de transformation de la pensée ou de la matière. Mais c’est d’une capacité presque absolue de mouvement qu’il est question ici, d’une puissance qui ne serait pas limitée par une détermination préexistante. Revenu à un état élémentaire (1), tout peut s’y « précipiter », pour reprendre un terme utilisé en climatologie, ou se métamorphoser (2), en quelque chose d’autre. Les frontières ne sont plus imperméables, entre les genres (l’histoire de l’art et la chanson de variété, les contes de fée et les sitcoms), non plus qu’entre l’humain et l’animal, la science et le burlesque ou la fiction.

Chaque moment, chaque forme, chaque état est critique, au cœur de plusieurs résolutions possibles – il semble que l’œuvre elle-même se confond avec ces états limite, de basculement physique (le 0° C, point de fusion de l’eau en glace, devenant dans une œuvre de 2008, 0°T), d’effusion physiologique (saignements de nez observés dans plusieurs performances et aquarelles) ou sentimentale, de retournement (de la vision – Autoportrait avec paire de lunettes pour évaluation des distances en terre froide (3), 1986, ou The one who sees blindly, 2011-2012, – et des apparences) ou de rupture (au sens où, dans certaines œuvres, comme la récente série de toiles intitulée Heaven’s door, la présence de plusieurs éléments hétéroclites dans une même composition rompt une chaîne de signification cohérente et oblige la raison à un nouvel effort de compréhension).

La fascination durable de l’artiste pour l’exploration comme pour l’expérimentation scientifique (réelles ou symboliques) peut se lire également comme une volonté de se maintenir, plutôt que dans le champ des réalisations et des certitudes, dans celui de la potentialité. C’est une entreprise singulière de recherche qu’elle poursuit alors elle-même, loin d’un quelconque positivisme ou de la démarche hypothético-déductive qu’elle pastiche pourtant dès ses premières œuvres, avec beaucoup de respect du reste : Conférence sur le froid, 1984, ou séries en laborantine, dont Expériences, de la deuxième moitié des années 1990. Au contraire, sa méthode, plutôt que des déductions, génère des hypothèses, c’est-à-dire l’ouverture de possibles. Dans un entretien avec Claire Le Restif, qui éclaire en profondeur sa pensée, elle décrit (sans récuser l’idée d’un aboutissement nécessaire dans les entreprises d’exploration comme dans son propre travail) la difficulté, lors de son séjour effectif au Groenland en 1987, à être soumise au réel :

Je ne voulais pas partir physiquement en exploration. Ça ne m’intéressait pas. Ce qui me motivait alors […] était de concevoir des projets, d’inventer des systèmes utopiques sans aboutir à leur réalisation. L’œuvre était un projet, sa finalité n’était pas du tout d’être réalisée. […] J’ai donc défini une méthode de travail et l’ai appliquée à une vingtaine de projets qui restaient archivés. […] Ils comportaient des textes, des avertissements, des dessins, jamais de conclusion, seulement des possibles. [Au Groenland] le travail était difficile parce que j’étais dans le réel et que le réel m’a glacée. […] Me rendre sur place a annulé tous les effets possibles de l’imaginaire (4).

Loin d’être un constat d’échec, cet aveu précise ce qui est le cœur même de son œuvre : la recherche d’un état, d’une position, qui ne soit pas un enfermement (une forme, une identité, une pensée closes) mais au contraire un passage, une voie, sans finalité préétablie. Nathalie Talec fait sienne cette citation de Knud Rasmussen : « Il n’y a qu’un but à notre progression : définir notre position. Nous traversons une terre inconnue et ignorons à tous moments ce que chaque nouveau regard doit nous révéler d’abîmes, mais notre allure reste toujours la même (5). »

Après 2007, certaines œuvres deviennent plus que des signes de cette nécessaire motilité du regard, de l’esprit, et de l’être – elles s’en font le lieu métaphorique. Ainsi du traîneau en céramique et du kayak en néon, présentés à l’occasion de l’exposition monographique de Nathalie Talec au MAC/VAL (6), et de Gimme Shelter (7), abri de verre et de lumière qu’elle conçoit à Saint-Étienne quelques années plus tard pour l’espace public.

La pièce maîtresse de l’exposition, In Search of the Miraculous, la route de l’écho, monumental radeau de néon posé dans le Grand Salon du Musée de Picardie, s’inscrit dans cette série d’œuvres, ainsi que dans un jeu de références multiples. Son titre rend clairement hommage à l’artiste conceptuel Bas Jan Ader et à sa dernière performance, éponyme, qui le vit quitter Cape Cod dans le Massachussetts en 1975, à bord d’une petite voile, pour une traversée de l’Atlantique qui n’aura pas de fin, mais restera une œuvre toujours en suspens (le corps de l’artiste ne sera d’ailleurs jamais retrouvé, laissant l’histoire inachevée). La route de l’écho fait quant à elle référence au Radeau de la Méduse (8) de Géricault, le plus fameux radeau de l’histoire de l’art, dont le Musée de Picardie conserve une copie conforme, à l’échelle, commandée précocement par le Louvre. Une autre histoire tragique, assurément, est à l’origine de ce chef-d’œuvre du romantisme. Mais c’est aussi d’un récit sur l’humain et sa puissance, donc, négative ou positive, qu’il s’agit : le cartouche sur le cadre du tableau présenté au Louvre dès son acquisition donnait d’ailleurs à lire le sous-titre suivant : « L’humanité est le seul héros de cette poignante histoire. »

Nathalie Talec s’empare ici d’une forme qui représente à la fois le refuge et la progression ; un mouvement de rétractation qui est en même temps potentiellement, et malgré tout, l’amorce d’un départ ; mais aussi bien inversement. Il y a du risque dans toutes ces entreprises, de la solitude, et, comme le remarquait déjà Claire Le Restif, de la mélancolie. Une mélancolie qui se rapporte peut- être moins à ce qui a été et qui n’est plus, qu’à tout ce qui aurait pu être et qui n’a pas été.

Jeanne Brun, janvier 2016

Jeanne Brun est conservatrice en chef du patrimoine, à la tête depuis 2014 du Fonds municipal d’art contemporain de la Ville de Paris et auparavant responsable des collections du Musée d’art moderne de Saint-Étienne Métropole. Elle a assuré dans ces fonctions le commissariat d’expositions et de programmations multiples (Catalogue, 2010, Fluxus, 2012, La Ville au corps, 2016, …). Elle est l’auteur d’une thèse de l’école des chartes sur Georges Ribemont-Dessaignes et les mouvements dada et surréaliste à Paris, et de nombreux articles et communications sur des artistes modernes et contemporains.

1. Nathalie Talec parle ainsi d’un des motifs centraux dans son œuvre : « Le flocon de neige reste dans l’ordre de la nature le seul motif proche du rien », Nathalie Talec citée par Anselm Jappe, in « La terreur blanche », Nathalie Talec, cat. d’exposition, Vitry, MAC/VAL, 2008, p. 72.
2. Encore sur la neige : « Le flocon de neige est une forme mathématique qui répond à une rigueur géométrique. Lors de sa métamorphose, il présente une grande diversité de formes et traverse plusieurs états… Intrinsèquement, le cristal de neige contient du désordre. Je pourrais assimiler mon langage artistique à ces actes de dissipation, de dispersion apparente, de désordre… et d’aléatoire. », Nathalie Talec citée par Arnaud Labelle-Rojoux, in « Que reste-t-il de l’amour », Nathalie Talec, cat. d’exposition, Vitry, MAC/VAL, 2008, p. 15.3. « J’ai créé un objet qui me met dans un état de cécité. Je ne peux pas voir au-delà de cette surface d’aluminium. », Nathalie Talec à Claire Le Restif, in « La première fois que j’ai vu la neige c’était au Paramount », Nathalie Talec, cat. d’exposition, Vitry, MAC/VAL, 2008, p. 183.
4. Nathalie Talec à Claire Le Restif, in « La première fois que j’ai vu la neige c’était au Paramount », Nathalie Talec, cat. d’exposition, Vitry, MACVAL, 2008, p. 174.
5. Nathalie Talec, Hommage à Knud Rasmussen, 1983-2008.
6. « Le traîneau et le kayak sont des instruments de transport, de déplacement et de glissement au sens propre comme au sens figuré », Nathalie Talec à Claire Le Restif, in « La première fois que j’ai vu la neige c’était au Paramount », Nathalie Talec, cat. d’exposition, Vitry, MAC/VAL, 2008, p. 180.
7. Gimme Shelter, 2012, commande de la communauté d’agglomération de Saint-Étienne Métropole dans le cadre du projet Ideal Home.
8. La Méduse, la frégate française qui fera naufrage au large de la Mauritanie en 1816, était accompagnée de plusieurs autres navires, dont la corvette l’Écho, le capitaine de cette dernière, par ses choix de navigation plus judicieux, évitera à son équipage la même tragédie. Le tableau de Géricault, composé à partir de 1818, présenté au Salon de 1819, est acquis par le Louvre dès 1824. Le Musée commande en 1859-1860 une copie conforme, qui sera réalisée par les peintres Pierre-Désiré Guillemet et Étienne-Antoine-Eugène Ronjat.

ENGLISH VERSION

Aristotle’s philosophy—and many others after him—distinguishes what is active from what is in potency, both in the physical and immaterial world. Two examples, often used, illustrate and specify these two modes of being. The block of marble, rough, is in potency a statue; but it is the sculptor who makes it exist, in act, by pulling a shape from the undetermined material. The egg too, is in potency; the animal that hatches is in act. In the first example, the potential is passive, needing the intervention of a third acting party; in the second one it is active, contained in the egg itself. Be that as it may, potential does not open to every possible determination: through a shell game, which guarantees a certain order of things, the act exists before potency. Thus the egg can become a bird, but not a goat. And within the act itself, in this very logic, in its achievement and total determination, resides perfection.

To me, Nathalie Talec’s Snow Balls strangely conjure these examples of the marble and the egg, through an audacious short-circuit, and by the evocative force of their whiteness and of their shape. It is certainly because the artist captures in them—in the sense that she reaches and preserves it—a state of suspension and opening, in the reference to physical phenomena (snow as a state of unstable equilibrium of water, crystallised by the cold); as much as on the formal plan (the imperfect ovoid containing multiple potential forms); or the fictional plan (the snow ball evokes both the gentleness of childhood and the harshness of battle).

In this way, there is in Nathalie Talec’s work something that stubbornly refuses to be in act. On the contrary, the meaning of her work is held in what is both in reserve and in germ; both latency and a capacity of movement and transformation of thought or matter. But here, it is a nearly total capacity of movement, a potential that wouldn’t be limited by a pre-existent determination. Back to an elementary state (1), everything can “precipitate”, to borrow a term used in climatology, or transform (2) into something else. Borders aren’t impervious anymore, between genres (history of art and variety tunes, fairytales and sitcoms), any more than between the human being and the animal, science, and burlesque or fiction.

Every moment, every form, every state is critical, at the heart of several possible resolutions—it seems that the work itself merges with these limit states. There is the physical failover (the 0°C, point of fusion from water to ice, becoming in 2008 a work of art, the 0°T); the physiological effusion (nose bleeds observed in several performances and watercolours); or the sentimental effusion. There is also reversal of vision and appearances, e.g., Self-portrait with a pair of glasses to evaluate distances on cold earth (3), 1986, or The one who sees blindly, 2011-2012. There is rupture, rupture in the sense that, in some works, like the recent series of paintings named Heaven’s door, the presence of several motley elements in one composition breaks a consistent chain of coherent meaning, and forces reason into a new effort of comprehension.

The artist’s long-lasting fascination for exploration, as for scientific experiments (real or symbolic) can also be read as a will to maintain herself, rather than in the field of realisations and certainties, in that of potentiality. It is a singular undertaking of research that she then pursues, far from an ordinary positivism or from the hypothetico-deductive approach she yet pastiches from her first works, with a lot of respect for the rest: Conference about the cold, 1984; or series as a laboratory technician, including Experiments, of the second half of the 1990s. On the contrary, her method leads to hypotheses rather than deduction, meaning the opening of possibilities. In an interview with Claire Le Restif, which deeply clarifies her thoughts, she describes (without denying the idea of a necessary achievement in the exploration undertakings as well as in her own work) the difficulty, during her productive stay in Greenland in 1987, to be subjected to reality:

I didn’t want to physically go exploring. That didn’t interest me. What motivated me at that time (…) was conceiving projects, inventing utopian systems, but without putting them into practice. The work was a project, its point was not at all to be made. (…) So I defined a working method and I applied it in a score of projects that I still have in the archives. (…) They included texts, forewords, drawings, but never conclusions; only pos- sibilities. (…) Working on-site was difficult because I was in the real and the real froze me out. (…) Going to the place cancelled out all its imag- inary resonance (4).

Far from being a statement of failure, this confession clarifies what is the heart of her work: the search of a state, of a position, that is not a confinement (enclosed form, identity, thoughts) but on the contrary a passage, a path, with no pre-established purpose. Nathalie Talec makes this quote by Knud Rasmussen her own: “Our progression only has one goal: to define our position. We go through an unknown land and at every moment, we ignore what each new glance must reveal to us, but our attitude is always the same” (5).

After 2007, some works become more than signs of this necessary motility of vision, of spirit, and of the being—they become its metaphorical place. Thus of the ceramic sled and the neon kayak, presented on the occasion of Nathalie Talec’s monographic exhibition at the MAC/VAL (6), and of Gimme Shelter (7), a glass and light refuge that she designed in Saint-Etienne a few years later for the public space.

The masterpiece of the exhibition, In Search of the Miraculous, la route de l’écho (8), a monumental neon raft placed in the Grand Salon of the Picardy Museum, fits within this series of works, as well as in a game of multiple references. Its title clearly pays tribute to the conceptual artist Bas Jan Ader and to his last, eponymous performance, which saw him leave Cape Cod, Massachusetts in 1975, aboard a small sailboat, for a crossing of the Atlantic, which will never end, but will stay a pending work of art (the artist’s body has never been found, leaving the story unfinished). La route de l’écho refers to The Raft of the Medusa (9) by Géricault, the most famous raft in art history, of which the Picardy Museum keeps an exact replica, true to scale, early ordered by the Louvre. Surely, another tragic story is the origin of this masterpiece of the Romantic Movement. But it is also a story about the human being and his potential, negative or positive: besides, the scroll on the frame of the painting presented at the Louvre when it was acquired, read the following subtitle: “Humanity is the only hero of this poignant story”.

Here, Nathalie Talec takes hold of a form that represents both shelter and progression; a retraction movement which is also potentially, and in spite of everything, a signal of a new beginning, but also the converse. In all these undertakings there is risk, loneliness, and, as Claire Le Restif had already pointed out, melancholy. A melancholy which, perhaps, relates less to what was and isn’t anymore, than to what could have been and never was.

Jeanne Brun, January 2016

1. Nathalie Talec talks about one of the main patterns of her work: “The snowflake is the only pattern in the natural order that is close to nothingness”, Nathalie Talec quoted by Anselm Jappe, in “The white Terror”, Nathalie Talec, exhibition catalogue, Vitry, MAC/VAL, 2008, p.72
2. About snow: “The snowflake is a mathematical form that corresponds to geometrical rigour. When it metamorphoses it takes a great diversity of forms in several states. Intrinsically, snow crystal contains disorder. I could compare my artistic language to these acts of dissipation, of apparent dispersion, of disorder… and randomness.” Nathalie Talec quoted by Arnaud Labelle-Rojoux, in “What is left of love”, Nathalie Talec, exhibition catalogue, Vitry, MAC/VAL, 2008, p.15
3. “I created an object that put me in a state of blindness. I cannot see beyond that aluminium surface.” Nathalie Talec to Claire Le Restif, in “The first time I saw snow was at the Paramount”, Nathalie Talec, exhibition catalogue, Vitry, MAC/VAL, 2008, p.183
4. Nathalie Talec to Claire Le Restif, in “The first time I saw snow was at the Paramount”, Nathalie Talec, exhibition catalogue, Vitry, MAC/VAL, 2008, p.174
5. Nathalie Talec, Hommage à Knud Rasmussen, 1983-2008.
6. “Like the kayak, the sled is a means of transport, of displacement and shifting, both literally and figuratively”, Nathalie Talec to Claire Le Restif, in “The first time I saw snow was at the Paramount”, Nathalie Talec, exhibition catalogue, Vitry, MAC/VAL, 2008, p.180
7. Gimme Shelter, 2012, order of the agglomeration community of Saint-Etienne Metropole within the Ideal Home project.
8. The Echo, one of the Royal Marine’s frigates, departed to colonize Senegal before its dramatic running aground.
9. The Medusa, the French frigate that sank off the Mauritanian coast in 1816, was accompanied by several other ships, including the Echo corvette. The corvette’s captain, by making wiser navigation choices, spared his crew the tragedy. Géricault’s painting, composed in 1818 and presented in the 1819 Salon, was acquired by the Louvre in 1824. In 1859-1860, the Museum ordered an exact replica, which was done by the painters Pierre-Désiré Guillemet and Étienne-Antoine-Eugène Ronjat.